Cet article est un extrait (retravaillé) de notre échange avec Xavier pour "12 minutes avec...". Les propos, le parcours, les intentions tout était plein d'une profonde sensibilité et il nous paraissait intéressant de les retranscrire par écrit. Cette démarche va certainement, d'ailleurs, être mise en oeuvre pour les autres épisodes de la WebSérie, nous en reparlerons plus tard.
Mais, dans l'immédiat, place aux mots du contrebassiste/ compositeur, Xavier Normand auquel on doit, entre autres, la mise en musique des textes de Nina Kibuanda. On peut saisir la beauté et la puissance de leur duo dans ce magnifique extrait de "CORDES SENSIBLES: ESPRIT LIBERE" à savourer...
Avec Xavier Normand, nous allons marcher ensemble sur les bords de l'Erdre ou de la Loire, en nous imprégnant du monde pour créer des mélodies, créer des choses qu'un instrument va retranscrire derrière. La marche est un outil pour créer ?
Oui, c'est une certaine forme d'introspection peut-être, de réflexion, d'inspiration... J'écoute le son de la ville, aux bruits de la ville. Ce sont des choses qui me parlent et j'essaie de trouver là dedans, des choses sur lesquelles rebondir.
Quand la musique est-elle entrée dans ta vie ?
Vers l'âge de 12-13 ans. J'avais envie de faire de la guitare à l'origine L'instrument me plaisait. Le rapport aux cordes, les vibrations, le son... Plus tard, je suis allé vers la musique.
La guitare d'abord, la batterie après, avec Klaktonclown notamment...
C'est ça. On a joué une dizaine d'années ensemble avec Klaktonclown. On a fait plein de belles scènes dans de beaux endroits, on a beaucoup joué, on a pris beaucoup de plaisir.
Comment es-tu passé de la guitare à la batterie ?
Je suis vite arrivé à la batterie. J'ai commencé à la guitare dans un groupe ou deux autour de chez moi et il y avait une batterie qui m'appelait. J'ai donc commencé à en faire. En fait, j'aime bien le changement, j'aime bien apprendre des choses et j'étais arrivé à un moment avec la guitare où je n'arrivais pas à retrouver les sons que je cherchais... J'étais un peu à une limite. Je me suis donc mis à la batterie. J'ai découvert d'autres choses, d'autres sonorités. Le jazz m'intéressait, je me suis dit, la batterie va plus m'amener vers le jazz… Finalement, ça m'a emmené vers Klaktonclown qui n'était pas jazz, mais par contre qui avait des textes. Ca m'a plutôt amené vers les chansons à texte et le texte en général.
...qui plus tard t'amènera à la poésie, mais on en parlera après ! Extraordinaire...
Oui. Ce sont des accidents on va dire. En fait, ce qui me plaît dans la musique, c'est quand ça vibre. C'est pour ça que la contrebasse était un instrument qui m'allait bien parce que ça vibrait, pas comme une batterie, ça vibrait sur moi directement.
Parle-nous de la contrebasse...
La batterie ne m'amenait pas assez de jazz, à mon goût. Pour en arriver plus près, la contrebasse me semblait l'instrument le plus accessible pour moi parce que j'arrivais d'un instrument à cordes, la guitare, et rythmique, la batterie. La contrebasse est un condensé de ces deux instruments. Plus tard, à 30 ans, je suis rentré au Conservatoire et j'ai fait les cursus Classique, Jazz, en contrebasse. Là j'ai appris l'instrument, la musique aussi, parce que je ne savais pas la lire. J'étais un peu autodicate. Je me suis retrouvé en cours avec des enfants de 12 ans, j'ai appris avec eux, en toute humilité. J'ai fait tous ces cours, tous ces cursus...
Tu as absorbé aussi ce que ressentaient les enfants !
Oui. C'est avoir le recul par rapport à ce que les enfants vivent. Comment ils vivent la musique, comment ils appréhendent le son, tout ce monde musical qui s'offre à eux. Moi j'avais une certaine expérience d'autres choses, de la scène, notamment, mais par contre, je n'avais pas leur culture musicale. C'était assez rigolo... Je suis resté 6 - 7 ans. C'était une période un peu dense : j'avais toujours des concerts en batterie, je commençais à en avoir en contrebasse. Klaktonclown finissait, on s'est retrouvés à 3 : je faisais la batterie et la contrebasse. C'était la transition !
La musique t'apporte quoi personnellement ?
Je crois que c'est un truc physique. Encore une histoire de vibration. C'est ce que j'ai cherché depuis toujours : vibrer. Ce n'est pas facile à expliquer, mais c'est une vibration qui me fait du bien. C'est quelque chose de très égoïste comme façon d'appréhender la musique!
Mais c'est pour donner, pour transmettre.
Oui. Absorber et transmettre ce que je ressens.
Sentir, absorber, transmettre. Vibrer!
Tu composes?
Dans Klaktonclown, on avait une composition partagée. Et au fur et à mesure, j'ai fait mes arrangements tout seul. J'ai pris aussi des cours de composition, d'écriture, pour affiner tout ça, au Conservatoire aussi. Maintenant, avec Cordes Sensibles, je compose tout de A à Z.
Cordes Sensibles, c'est la rencontre avec un Monsieur des mots, de la sensibilité, et du corps aussi, qui s'appelle Nina Kibuanda.
On s'est rencontré il y a deux ans et demi environs lors d'une soirée chez une copine, on a discuté, on s'est bien entendus. Il m'a appelé deux semaines plus tard pour me parler d'un projet sur lequel il était et que j'ai intégré : « Mots en Fleurs ». On a commencé à travailler ensemble aussi dans les ateliers dans les écoles, sur la mise en mots et en musique des textes que les enfants peuvent écrire. Je lui ai dit « Mots en fleurs » c'est chouette, mais je pense qu'il y a quelque chose de plus intime à travailler, plus intéressant chez toi, à mon goût. De là est né « Cordes Sensibles »., avec des textes qu'il avait déjà écrits, qui parlaient vraiment de lui et de son histoire...
Vous vous êtes connectés grâce aux mots.
Les mots, oui. Je suis toujours sensible à l'écriture. Je ne sais pas écrire de poésie ou de chansons, donc dès que quelqu'un sait le faire, ça m'intéresse évidemment. C'est quelque chose que j'avais envie de faire depuis longtemps, cette idée de slam - spoken word, en musique. Du fait de notre rencontre, on a réussi à créer ça.
Parce que « Mots en fleurs », comme son nom l'indique, ce spectacle était un projet de faire germer les mots, de les faire pousser...
Exactement. Mais, à mon goût, c'était moins intime. J'aimais moins le propos. C'était intéressant, mais le propos de « Cordes sensibles » l'est plus à mon goût.
Donc, tu l'as poussé à aller plus loin. A se dévoiler, on va dire.
Exactement. Un jour, sur un concert de « Mots en fleurs », il a commencé en faisant un autre texte qui ne faisait pas partie du spectacle, tout seul. Ca n'était pas prévu. Et là je lui dis : c'est ça qu'il faut faire. C'est là dessus que tu es bien. Et c'est ça qu'il faut creuser.
Tu as donc fait les musiques...
Oui. On est aidés par Ulrik au son, aux machines, qui trafique un peu, qui donne des effets. Il y a tout ce que je donne comme son, lui, il en récupère une partie, il la retravaille, et il y a une autre partie que moi je sample. C'est un travail à trois.
Comment compose-t-on sur les mots de Nina ?
On lit les textes et ça donne des images, qui ne sont pas forcément les siennes, ça n'est pas forcément des choses qu'il voit, ce sont des choses qui me semblaient aller avec ce qui était écrit.
C'est grâce aux balades aussi ?
Des balades, des réflexions... C'est beaucoup de travail, d'essais, de recherches. Je suis quelqu'un de très laborieux, donc, c'est beaucoup de temps à essayer, à remanier...
Comment travaille-ton avec Nina?
Il y a son texte. Je lui propose des musiques, après il se cale sur la musique, après, je change la musique, il se recale sur la nouvelle musique, on se crée l'interaction et on se laisse aussi des plages d'improvisation pour le spectacle... Question/ réponse, avec Ulrich aussi, pour avoir une matière vivante le plus possible.
C'est un dialogue entre les mots et la vibration de ces mots
C'est ça, la vibration. Une vibration recherchée et permanente...
Que vous projetez avec une force... Je le redis, à la fin, on est bien bien touchés par tout ce qu'on a vécu. Tout ce que vous nous avez donné. Bravo pour tout ça !
Merci de m'avoir invité !
Pour voir les images, c'est ici...
"12 minutes avec..." - XAVIER NORMAND
(attention: souci technique de synchronisation sur cette vidéo, pardon)
"12 minutes avec..." - NINA KIBUANDA
Pour une présentation générale de "CORDES SENSIBLES", cliquez sur l'image ci-après
« 12 minutes avec... »
Une production les Studios Bellarue 17 et Culture Etc
avec le soutien de la ville de Nantes
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