Slameuse/ Slameur: Clarence
Equipe de: Rennes
Pourquoi Slamez-vous?
Enquête auprès des slameurs sélectionnés pour la Coupe de la Ligue Slam de France 2019 www.ligueslamdefrance.fr
Enchanté Clarence. 1ère question : comment as-tu rencontré le slam ?
Enchanté Philippe. Ca commence à dater parce que c'était quand j'étais au Collège à Brocéliande. On a eu des ateliers slam avec Mamat et Flo dans la classe de 3ème. Je ne connaissais pas du tout avant cet univers-là avant. Il y avait une sélection par classe, deux personnes pour un tournoi inter-collège à Mauron. A partir de là, j'ai écrit un texte, je ne savais pas trop à quoi m'attendre, j'ai été sélectionné, après, j'ai fait le tournoi et j'ai gagné... Du coup j'étais très content ! La base est là. Ca fait 5-6 ans maintenant.
Tu n'écrivais pas du tout avant ?
Non. J'aimais lors des écritures d'inventions, l'idée d'être libre à travers un texte et de m'épanouir avec, mais je ne savais pas qu'on pouvait concrètement appliquer ça à l'échelle d'une scène slam, partager avec les autres. Je n'avais jamais posé mes mots sur le papier pour les déclamer après. Mon envie d'écrire s'est peut-être développée par ce biais-là et sur les années qui ont suivi j'ai continué, j'essayais de m'améliorer. Après la découverte du slam, c'est parti et c'était trop tard !
Est-ce que tu lis?
Oui. J'ai toujours aimé la poésie. Au lycée, au collège, j'ai toujours apprécié les mots, la littérature. J'étais plus un littéraire dans l'âme qu'un scientifique, j'étais plus proche de cet univers-là que de celui un peu froid, des mathématiques. J'ai toujours aimé lire, j'ai toujours aimé même après que ce soit par le biais du coup plus de l'écriture ou même de par l'oralité, j'ai toujours bien aimé intervenir à l'oral. C'était même un point fort à l'école : les profs disaient que j'étais assez, sans prétention, éloquent par rapport peut-être à d'autres élèves un peu plus réservés. Du coup, on va dire que si on marrie les deux, l'amour de la littérature et mon aisance à l'oral, le slam était presque déjà là !
Quand as-tu commencé à aller aux scènes de slam parce que tu étais très jeune à ce moment-là?
Quand j'ai fait le tournoi, j'étais donc en 3ème. L'année s'est terminée sans que je ne m'y mette vraiment. C'est l'année scolaire d'après, quand je suis rentré en seconde, que des scènes slam ont commencé à s'organiser près de chez moi à Josselin. C'était vraiment le tout début. Je n'habitais pas très loin, j'en ai entendu parler, l'organisateur, Philippe, était une des personnes avec qui j'étais allé au Championnat de France. J'ai recommencé à écrire et j'ai retrouvé l'intérêt à ça : je pensais que le tournoi inter-collège était quasiment une fin en soi, je me suis rendu compte que non, il y avait des scènes partout en France ! Dès le début de la 2nde, je suis allé sur la scène de Josselin de façon assez régulière, après, il y a eu le tournoi O'Slam etc sur mon année de 2nde, j'y ai participé et toutes les années suivantes aussi jusqu'à cette année. A Rennes, j'ai pu plus facilement accéder à d'autres scènes...
Tu écris pour le slam mais écris-tu aussi autrement ? D'autres types de format ? Là tu as vraiment mordu au slam, c'est clair, mais est-ce que tu as envie aussi d'écrire d'autres types de textes ?
Déjà, je ne sais pas s'il y a un format de slam ! Dans tous les cas, j'ai des textes, certains vont être plus un peu de la poésie, d'autres vont être plus dans le style du rap et j'ai bon nombre de textes que je ne partage pas sur des scènes slam. Ils pourraient peut-être s'y adapter mais je les garde pour moi, je pense que tout le monde le fait. J'ai déjà pensé à écrire un format du style roman ou nouvelles. J'aimerais bien me tester à ça, c'est un investissement sur du plus long terme. J'ai aussi pensé m'essayer au rap, mon slam s'apparente à du rap a cappella parfois, je m'y retrouve bien.
Actuellement, tu fais quoi ? Tu as une idée de ce vers quoi tu vas t'orienter ?
L'année dernière, j'étais en prépa littéraire à Chateaubriant et cette année je me suis réorienté en fac de géographie à Rennes 2. J'aimerais bien travailler soit dans le développement durable, l'aménagement l'urbanisme quelque chose comme ça...
Mais, faire du travail sur les mots ton métier, c'est quelque chose que tu envisages ou c'est vraiment une passion, un loisir ?
L'idéal serait d'arriver à marier dans ma vie professionnelle plaisir et travail... S'il arrivait que je sois amené à pouvoir commencer animer des ateliers de façon régulière, à pouvoir en vivre je pourrais y penser ! Si un loisir me permet de vivre je ne vais pas me fermer les portes, c'est sûr.
Comment écris-tu ? Le matin, le soir ? Dans un café, chez toi, dans le bus...
Tout ça! J'écris à n'importe quel moment. Beaucoup de personnes m'ont dit qu'elles se posent dans le calme, dans un endroit silencieux, pour écrire pendant une heure par exemple, moi si j'ai une idée, à aucun moment je vais la repousser. J'ai une idée, j'écris sur tout ce que j'ai : mon cahier, mon téléphone, un peu partout, des fois qu'une phrase ou deux même juste des rimes... Les idées, je les note dès que j'en ai, même si des fois je suis couché, je vais me réveiller pour les noter que ce soit le matin, le soir. J'écris tout le temps ! Après, si je commence un texte et que l'inspiration vient, je peux écrire pendant une ou deux heures, ça m'arrive. Je travaille quand même plus par à coup que par longues séquences programmées.
Tu fonctionnes sur de l'envie, du plaisir, du désir...
Je me dis qu'il ne faut pas se forcer. L'inspiration, l'imagination, la création, quand c'est forcé, quand c'est on va dire presque demandé ou que tu sais que tu as un laps de temps très court, tu n'auras pas la liberté de te dire que c'est vraiment ce que tu voulais faire à la base et tu vas te restreindre au fait que « là je n'ai ça, j'ai pas trouvé mieux pour l'instant, tant pis ». Je trouve que c'est dommage si on peut faire mieux de se contenter de 50% de ce qu'on aurait pu faire. Je préfère partir du principe que je ne me force jamais à écrire et quand ça vient, je laisse venir...
Quand est-ce que tu sais que ton texte est fini ?
C'est assez compliqué parce que, à la fois je suis assez perfectionniste et, à la fois, j'aime bien quand ça vient assez naturellement. Ca rejoint ce que je disais à l'instant, j'aime pas quand c'est forcé je me dis non, là il est trop court ou trop long il faut que j'enlève des trucs, je sais que souvent ça m'embête. Je pense que j'ai un idée globale de la chose, il m'arrive très souvent d'avoir l'idée de la fin du texte avant quasiment d'avoir écrit le texte ou avant de l'avoir fini, ça c'est sûr et donc ça fait que sans parler pour autant de combler des vides, je sais que des fois je vais le retravailler, comme si on partait du coup du haut pour aller vers le bas, jusqu'aux racines, ou, à l'inverse, des fois je pars quand même du début et je le fais de manière plus linéaire. Ca varie vraiment beaucoup selon le texte. Des fois, ce sont même des phrases que je vais écrire comme ça et presque sans m'en rendre compte, ça va faire un texte. Quand c'est un thème particulier, j'ai souvent une histoire en tête. Ca varie vraiment selon le thème, le genre de texte, selon tout ça... Ca diffère vraiment tout le temps.
Mais as-tu quand même quelque chose qui te fait dire ça y est le texte est prêt, il est fini ?
J'ai l'habitude au niveau du format, je me dis que là, il faut pas écrire beaucoup plus sinon ça va être trop long et je sens que j'ai à peu près parcouru les éléments dont je voulais parler et donc oui en général je sens que là, c'est fini. Je peux retravailler deux trois phrases, parce que je me dis qu'il est fini sur la forme, mais j'aimerais bien l'améliorer sur le fond, refaire quelques phrases. Mais, de manière générale, c'est plus à l'instinct.
Quel est ton sentiment quand tu montes sur une scène slam ?
Je dirais que ça dépend de la scène et de mon état d'esprit. Si c'est une compétition importante, je vais forcément avoir le trac au moment du tirage au sort, j'ai vraiment la boule au ventre. Au moment où mon mon est tiré, j'essaie de me mettre dans une forme de bulle et je pense que j'oublie quasiment mon stress. Parce que je me dis maintenant c'est bon t'es lancé, quand je me dirige vers la scène, de toutes façons, tu as trois minutes pour kiffer ton moment et donner tout ce que tu as, montrer au public que tu n'es pas venu pour rien. A partir de là, je me dis juste que je suis déterminé, qu'il faut que je donne tout et le stress disparaît dès que je commence à slamer.
Donc ensuite, quel est ton sentiment pendant que tu slames ?
90% du temps, je vis mon texte de manière à ce que je n'ai pas le temps de réfléchir. Je suis habité parce que je dis et je ne suis pas à me dire ok là, il faut que tu parles comme ci ou comme ça. C'est très instinctif, pour ma part en tous cas. Je suis très peu à réfléchir à telle minute du texte je vais faire ça ou ça, c'est plus sur le moment, c'est très dans l'instant. Du coup j'improvise en quelque sorte le texte même si évidemment j'ai une préparation derrière. Il ne va jamais être fait de la même façon selon si je suis fatigué, selon les personnes qui sont là, selon l'humeur de la journée. C'est ça qui est bien je trouve quand même.
Et ton sentiment quand tu sors ?
Il y a quand même une forme de soulagement. Parfois de la déception quand tu n'as pas donné tout ce que tu voulais, mais bon, voilà c'est fait, j'ai donné ce que j'ai pu. Quand je passe en premier, je peux mieux profiter des autres passages et ne pas être stressé. Non je suis assez soulagé souvent.
Est-ce que quelque chose en particulier t'inspire ?
Le rap m'inspire beaucoup. J'entends la phrase d'un rappeur, je pense plus aux rappeurs qui sont un peu dans la poésie, qui ont quand même un peu du fond, je vais entendre une phrase et ça va me faire penser à quelque chose d'autre qui va me faire penser encore à quelque chose d'autre... Ca va me faire construire un schéma avec quelques rimes. A partir d'un idée, je vais aller sur une toute autre idée. Souvent, ça part comme ça. Des fois, ça va plus être un roman ou des fois même des choses tellement diverses. J'essaie vraiment de m'inspirer de ce qui m'entoure parce que je pense qu'on ne peut pas parler de choses qu'on ne connaît pas. Si, par exemple, je veux parler d'un enfant d'un bidonville, je ne vais pas juste me dire ça doit être comme ça, je vais faire plein de recherches pour stimuler mon imagination. Des mots vont venir et me donner des idées de rimes... Quand ce sont des choses plus personnelles, disons que ça vient naturellement puisque c'est ce qui me parle à moi, c'est ce que je ressens, mes émotions sur l'instant. Peut-être que dans deux ans certains textes ne me correspondront plus au niveau de mon état d'esprit, mais sur le moment c'est ce que je ressens par rapport à ma maturité à ce moment-là.
Est-ce que tu vas au cinéma beaucoup ?
Oui, j'y vais très souvent !
Merci Un grand merci à la Ligue Slam de France, à toute l’équipe de Rennes, notamment bien sûr à Clarence pour sa disponibilité... Propos recueillis par #PG9
Comments