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[Cartes Postales de la Folle journée...] Anne Queffélec

Dans le cadre de La Folle Journée de Nantes, Monstudiotv et Culture Etc se sont une nouvelle fois alliés pour vous proposer de plonger au coeur de l’événement. Nous sommes très heureux de vous proposer les “Cartes Postales” et les “Grands entretiens” de ce splendide événement réalisés avec l’aide de l’équipe en place. Merci à Solange Desormières pour son aide... Et sans plus attendre, voici l’interview “express”, d’une immense pianiste: Anne Queffélec. Qui se révèle intarissable sur le sujet!




Les images de la rencontre:




Prénom/ Nom/ Instrument/ Ensemble


Je suis Anne Queffélec, je suis pianiste et je suis une folle de la Folle journée... Un des nombreux fous et folles !


Votre première Folle journée ?


J'ai eu la chance en effet d'être là, présente et de participer à la toute première Folle journée, à la création, qui était consacrée comme il se doit, tout Seigneur, tout honneur à Mozart qui a donné son titre à la Folle journée. Puisque c'est en réalité le 2ème titre des Noces de Figaro. A vrai dire cette idée du titre, la Folle journée, je m'étais même permis d'en parler à René Martin, sachant qu'il allait rendre hommage à Mozart, ça m'était venu à propos des Noces de Figaro et de Mozart. Je ne veux pas du tout dire que je suis celle qui a trouvé le titre définitivement, je pense qu'il y a peut-être eu quelques personnes qui se sont rencontrées pour suggérer ça, en tous les cas, c'est ce qui a été adopté et c'est vraiment un titre merveilleux qui convient fantastiquement à cet événement à travers toutes les années depuis 25 ans. Cette toute première Folle journée, elle était, si l'on peut dire light légère, elle dirait seulement 2 jours, on attendait 12.000 auditeurs et il y en a eu 24.000. D'emblée, René Martin a su et toute son équipe qu'ils avaient vraiment mis le doigt sur quelque chose d'extraordinaire sur des révélations à travers ce concept qu'avait inventé René Martin. Des concerts courts, multiples, à prix très raisonnables, avec une thématique. Donc il a fait confiance c'est ça que je trouve très très beau à ses semblables il a fait confiance à leur capacité à s'élever au dessus d'eux mêmes et à aller vers la beauté et réciproquement ses semblables ensuite lui ont fait confiance aussi ensuite depuis 25 années puisque le public se presse très nombreux, toujours enthousiaste et le suit dans toutes les aventures, dans toutes les thématiques, même d'autres qui sont peut-être un peu plus aventureuses parfois, qui font justement découvrir des répertoires et des interprètes qu'on ne connaît pas et que par ailleurs hors Folle journée, on n'irait pas écouter et ça fait partie des effets bénéfiques magnifiques de cette Folle journée, aussi de faire découvrir, d'ouvrir les yeux sur toutes ces richesses environnantes et de décupler la curiosité aussi qui devrait toujours rester en éveil bien sûr.


Un mot pour ce 25ème anniversaire?


Alors un mot. Le 1er mot qui me vient, c'est « fraternité ». Qui peut aller évidemment convenir à d'autres Folle Journée que celle de cette année. Mais, je trouve que à l'époque présente où on parle beaucoup du fait que le lien social s'abîme et que finalement à l'intérieur de la technologie qui s'est développée d'une façon absolument vertigineuse parallèlement à la Folle Journée, parce que rappelons-nous, lors de la 1ère Folle Journée, il n'y avait pas de téléphone portable. Donc, c'est absolument inoui de penser depuis ce temps-là combien le monde autour de nous s'est transformé, combien, également, il y a de motifs de s'inquiéter et combien étonnamment au fur et à mesure que la communication, que la connexion est amplifiée de façon absolument vertigineuse il y a aussi énormément de solitude et je trouve que c'est un peu ce qu'on ressent en ce moment, ce besoin du rassemblement de se retrouver et quand on se retrouve ici avec la musique dans la beauté, on voit bien à quel point ça correspond à un besoin de plus en plus vital et que cette fraternité qu'on trouve à l'intérieur d'une salle de concert et entre musiciens aussi, ce qui est offert par la Folle journée, entre musiciens tous instruments confondus, c'est vraiment une richesse et un réconfort et une joie qui devient aussi cause de santé publique. Donc, merci à la folie saine de la Folle journée !


Quelle oeuvre rêveriez-vous de venir jouer à la Folle journée ? Pourquoi ?


Alors, sans hésiter, et je ne le fais pas par opportunisme parce que je sais d'ores et déjà que le thème de l'année prochaine, ce sera un grand hommage, le triomphe de Beethoven, ce fabuleux génie musical auquel nous devons tant justement de force d'énergie, de passion, une forme d'humanisme à travers sa musique qui est absolument irremplaçable, je voudrais jouer un programme qui associerait la 1ère et la dernière sonate que j'intitule l'alpha et l'omega des sonates, des 32 sonates de Beethoven. J'ai une passion pour la 32ème sonate, la dernière sonate de Beethoven, qui est une espèce de montée vers le ciel, le ciel de Beethoven, chacun peut se l'approprier. Il y a ce contraste entre le premier mouvement qui est une empoignade avec la condition humaine et ensuite le 2ème où il y a à la fois une forme d'acceptation et de sens de la contemplation et d'exploration, il y a des moments on se croirait dans la voie lactée tellement c'est d'une poésie infinie et là, oui, chaque fois que je joue cette oeuvre je me sens emportée prise dans la grande main de Beethoven dans la musique et je rêverais, j'espère, je ferai tout pour que ça marche et que René martin accepte mon programme !


Quelle œuvre rêveriez-vous d'entendre à la Folle journée ?


Je serais aussi, je croise les doigts, je ne sais pas s'il y a une date anniversaire qui justifierait si besoin est ce choix, je rêverais qu'il y ait une réédition de la Folle journée Jean-Sébastien Bach. Car je me souviens d'avoir vraiment pleuré comme une madeleine et partagé une boite de kleenex avec mon voisin auditeur dans la Grande Salle ici en écoutant la Passion selon Saint-Jean. Et c'était un moment aussi de pure beauté également à nouveau de fraternité dans la beauté et retrouver cela avec peut-être dans un autre concert aussi la Messe en Si de Bach, je serais extrêmement heureuse. Donc, ça serait une réécoute.


Quel compositeur vous fait le plus voyager ?


C'est la musique. Oui c'est la musique qui me fait voyager. Qui fait voyager sans prévenir. Où et quand. Et c'est la musique et c'est le public aussi. Plus je vais, plus je suis reconnaissante alors d'autant plus à notre époque où il y a toutes les raisons de la terre de rester chez soi avec la profusion de divertissements possibles, accessibles à travers internet. Donc, le fait qu'il y ait toujours des personnes et notamment ici que les salles soient pleines quoiqu'il arrive, donc ils préfèrent aller vers la vie plutôt que rester collé au virtuel, et donc cette présence, cette écoute du public et à nouveau cette fraternité, cette circulation de la musique partagée fait voyager dans un autre espace temps. On ne peut pas dire, par exemple, nous sommes à Nantes. Mais quand je suis dans une Folle journée à Tokyo, Katarinenburg, quand j'étais à Bilbao à Lisbonne, j'ai eu la chance de participer à toutes ces folles journées, au moment où on met les mains sur le piano et on sent cette écoute palpable du public, la qualité du silence, à ce moment-là, on décolle, en effet on voyage... Je ne pourrais pas réellement nommer ce pays, mais je vous dis c'est un autre espace temps à plusieurs. Donc on est lancés sur une autre stratosphère, sur orbite et immergé ailleurs. On est oui, vers l'ailleurs peut-être.


Y'a-t-il un pays dans lequel vous vous sentez particulièrement à l'aise pour jouer ?


Là, encore une fois, ça dépend des salles aussi et ça dépend des. Il y a des chimies propres à chaque concert, il y a des moments de grâce qui peuvent arriver absolument partout mais je reconnais que je donnerais, j'ai un faible, disons, pour le Japon, là, en tant que pianiste aussi. Les instruments là-bas, les pianos japonais sont réglés avec une conscience professionnelle fabuleuse et il y a une vraie notion de ce que représente au fond le respect qu'ils ont pour le travail, pour la beauté et leur propre exigence envers eux-mêmes et l'écoute du public qui est absolument ahurissante dans la mesure où on n'entend jamais, on ne parle même pas des portables, ça c'est inenvisageable, mais même pas tousser et je me dis à chaque fois, est-ce qu'ils ont des cordes vocales différentes est-ce qu'ils n'ont pas les mêmes glottes que nous ? Parce qu'ici, en Europe d'une manière générale, il ya quand même bien souvent des toux absolument inappropriée qui tombent souvent dans des moment les plus douces fin de phrase, les moments les plus suaves et tout d'un coup ça disparaît dans une gorge irritée et c'est vrai qu'à ce moment-là on en veut un peu à la personne qui tousse. Il y en a qui ne peuvent pas faire autrement, mais il y en a qui pourraient. Donc, dans ce pays-là, ce respect qu'ils ont envers la beauté et l'art est particulièrement exceptionnel. Ceci étant, par exemple à la Folle journée, ici en France il y a aussi de très beaux pianos. Donc, je ne suis pas du tout en train de dire que les collègues européens ne sont pas aussi bons que les japonais, il y a peut-être d'autres conditions de travail, une autre organisation, mais en tous cas, c'est vrai que c'est un pays où j'aime beaucoup aller en tant que musicienne.



Ecrivez-vous des carnets de voyage vous-même ?


Alors j'écris des carnets, c'est vrai. J'ai toujours des carnets, j'ai un carnet dans mon sac qui voyage avec moi. Je note des petites anecdotes en effet, mais ça n'est pas forcément sur un plan, je ne me lance pas dans des descriptions géographiques. Ce sont plutôt des sentiments que j'évoque, des émotions, des rencontres... C'est vrai que si j'avais un peu plus de temps, volontiers dans les détails je rentrerais plus. Je l'ai fait davantage à une certaine époque. Il y a aussi quelque chose qui m'est vital, c'est que j'ai besoin de lire. J'ai besoin des mots des autres et donc, il y a des moments où, soit on prend des notes, soit on lit et c'est vrai que et c'est la même chose par rapport à la musique aussi souvent je me sens tiraillée entre l'appel de la musique et celui de la lecture, les deux étant évidemment complémentaires d'ailleurs, mais si les journées étaient plus longues et si je pouvais me dire que j'ai encore un siècle devant moi, à ma disposition, je pense que je prendrais plus de notes oui.



Merci aux artistes et à à toute l’équipe du festival!










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